Pourquoi est-il si difficile – pour nombre dâentre nous – de parler dâargent ? đ€
Ă la limite, peu importe la rĂ©ponse, ce qui nous importe câest comment changer de paradigme, comment Ă©voluer sur le sujet pour ĂȘtre enfin Ă lâaise avec.
Câest important – Ă mon sens – dans nos vies dâavocat car :
- nous gĂ©rons souvent des questions dâargent pour nos clients đ„,
- nous gĂ©rons tout le temps des questions dâargent pour nos cabinets đą.
Nous devons donc nous affranchir de nos prĂ©ventions avec lâargent, essayer tout au moins âš.
Je me souviens dâune confĂ©rence, il y a fort longtemps, consacrĂ©e Ă lâintroduction – alors future – de lâeuro en France. đ¶ Je sais, ça date⊠Les quidams et les quidamettes dâalors Ă©taient trĂšs circonspects vis-Ă -vis de cette nouvelle monnaie.
Conscient de ce biais, le confĂ©rencier a dĂ©marrĂ© son allocution en indiquant quâil nâallait pas Ă©voquer des concepts mais parler pogne, thunes, flouze, pez, maille, cash.
AprĂšs cela, on avait tous hĂąte de jouer avec les nouvelles piĂšces de la âmonnaie uniqueâ.
Jâaimerais mâapproprier sa drĂŽlerie et son pragmatisme pour vous parler dâargent autrement. đŹ
Je vais tenter de le faire en partant de 3 idées sur le sujet :
- je ne gagne pas assez đ,
- je suis trop cher.Ăšre đž,
- je suis une femme đ©âđŒ.
Je ne suis pas assez payĂ©.e pour mon travail đđŒ
Câest le cas lorsque je travaille Ă lâaide juridictionnelle ou pour des compagnies dâassurance qui mâimposent un barĂšme. Le montant des honoraires est sans lien avec le temps que je passe sur le dossier, mon expĂ©rience professionnelle, mes coĂ»ts de fonctionnement.
Que faire ? đ€·ââïž
Comme les alcooliques anonymes đ·, je distingue ce qui ne dĂ©pend pas de moi et sur ce quoi je peux agir, et jâagis sur ce qui est de mon ressort đȘ.
En l’occurrence :
- le temps consacrĂ© Ă chaque tĂąche đ,
- mes coĂ»ts de fonctionnement âïž.
Oui, on peut dĂ©cider de ne pas passer plus de X heures Ă rĂ©diger des conclusions, ce nâest pas une faute professionnelle. Nous savons tous que nous pourrions souvent faire plus synthĂ©tique, mais parce que nous imaginons que notre client.e attend âdu lourdâ ou que nous pensons quâil faut TOUT DIRE – quitte Ă accabler le magistrat de dĂ©tails dont il nâa cure, nous avons pris lâhabitude de faire long, trĂšs long, voire trĂšs trĂšs long⊠đđ
Pourtant, quand on lit les conclusions adverses ou un jugement, on va direct au âPAR CES MOTIFSâ parce que câest ce qui est intĂ©ressant, le resteâŠ
Retrouvons donc le goĂ»t de la synthĂšse, sĆur de lâefficacitĂ© đĄ, et si on y ajoute un soupçon de legal design, tout devient possible. đšđïž
Oui, on peut aussi dĂ©cider de limiter le temps dâĂ©change avec ses clients Ă ce qui est rĂ©ellement nĂ©cessaire pour le traitement de son dossier et QUAND câest nĂ©cessaire. On peut Ă©galement utiliser AppliCab pour rationaliser la communication avec son client et gagner du temps, beaucoup de temps.
Prenons lâexemple dâun voyage en avion, tous les passagers bĂ©nĂ©ficient de prestations identiques : sĂ©curitĂ© aĂ©rienne, qualification du pilote, horaires, etc. En revanche, les prestations sont diffĂ©rentes selon que lâon voyage en 1Ăšre ou en Ă©co : accĂšs prioritaire, champagne, taille des bagages, etc.
Tout ce qui est accessoire Ă la prestation elle-mĂȘme peut donc ĂȘtre adaptĂ© en fonction de la rĂ©munĂ©ration perçue.
Je suis trop cher.Ăšre đž
âCher – chĂšreâ câest subjectif, câest un ressenti. đ€
Ce restaurant est cher. đœïž Il a 3 Ă©toiles, rien de surprenant âââ.
Le nouvel iPhone est cher đ±, mais les client.e.s font quand mĂȘme la queue une nuit durant pour acheter les premiers exemplaires. đŹâșđŽïžđŽïžđŽïž
Telle ou telle marque est inabordable đ, pourtant ça fait 50 ans quâelle existe, elle doit bien en vendre des chemises Ă 500 âŹ. đ”
Donc, âcherâ câest une opinion et ça nâempĂȘche pas de vendre.
Et, ce nâest pas lâavocat.e qui est cher, mais (Ă©ventuellement) sa prestation. Or, connaissez-vous le coĂ»t de vos prestations ? đŒđ Savez-vous si votre cabinet est rentable ? Globalement ? Par type de prestation ? đ€
Si vous avez envie de creuser le sujet, cet article vous intĂ©ressera sans doute : RentabilitĂ© du cabinet dâavocat
Ce travail sur les honoraires permet de dĂ©finir des tarifs dont on sait quâils sont justes âïž, quâils couvrent notre rĂ©munĂ©ration, les frais de fonctionnement du cabinet, et gĂ©nĂšrent de la trĂ©sorerie pour investir (communication, formation, etc.)
Et la rĂ©munĂ©ration de lâavocat.e nâest pas une variable dâajustement !
đ„ Vous demanderiez Ă votre boulanger de vous vendre son pain Ă perte ? Ou de retrancher du prix de vente de la brioche la part qui constitue sa rĂ©munĂ©ration ? đ
Ne le faites donc pas pour vous ! đ
Donc, si un prospect me trouve chĂšre đ”, je lui dis que je comprends et que je peux lâorienter vers un confrĂšre ou une consĆur qui pratique des tarifs plus attractifs. đšââïžđ©ââïž
9/10 dĂ©clinent la proposition et signent ma lettre de mission. âïžâïž
Et quand ce sont mes copines avocates qui me disent que je suis chĂšre, je leur rĂ©ponds que je ne suis pas chĂšre, je suis rentable đ. Il y a quelques annĂ©es, je ne lâĂ©tais pas et ça a failli me coĂ»ter trĂšs cherâŠ
Je suis une femme đ©đ©âđŒ
Et oui, lâargent est sexiste đŹ. Femmes et hommes nâont pas le mĂȘme rapport Ă lâargent.
DĂ©jĂ âse vendreâ ou âproposer ses servicesâ lorsque lâon est une femme recouvre un sous-entendu, une rĂ©fĂ©rence au travail du sexe – consciente ou pas – qui ne facilite pas une rĂ©flexion sereine sur le sujet.
Et, par dessus le marchĂ©, lâĂ©ducation financiĂšre est diffĂ©rente selon que lâon est une fillette ou un garçonnet.
Les femmes partent donc avec un handicap lorsque lâon parle dâargent, dâhonoraires, de rĂ©munĂ©ration. Rien ou presque ne nous prĂ©pare Ă nous sentir lĂ©gitime Ă ârĂ©clamerâ de lâargent en contrepartie de notre temps et de notre savoir-faire. Et – malicieusement – jâajoute quâau contraire, on est plus habituĂ©es Ă fournir gratuitement notre temps et notre savoir-faire, comme le montre les statistiques sur le (non)partage des tĂąches domestiques đ§č
Il faut donc se rĂ©Ă©duquer pour penser Ă lâargent diffĂ©remment, se former sur le sujet. Poser des donnĂ©es objectives, fixer ses tarifs selon des critĂšres objectifs âïžđŒ, ce qui permettra de les annoncer, les assumer et les dĂ©fendre sans effort. Si je connais mon seuil de rentabilitĂ©, je sais en-deça de quel montant je ne veux pas travailler.
Une âruseâ consiste aussi Ă se âdissocierâ. Ce ne sont pas âmesâ prix, mais les tarifs du cabinet, lequel est une entreprise, laquelle doit ĂȘtre rentable sauf Ă mettre sa pĂ©rennitĂ© en pĂ©ril. Ce nâest pas moi, non plus, qui envoie les factures ou les relances, câest mon âservice comptabilitĂ©â qui a sa propre adresse mail đ.
Je me crĂ©e aussi des modĂšles de messages pour envoyer les factures, les relances, histoire de rationaliser le propos ou jâutilise les messages-types proposĂ©s dans AppliCab