Avocats : recouvrer les honoraires impayés

Les honoraires d’avocats représentent bien plus que la simple rémunération des services juridiques. Ils incarnent un équilibre délicat entre la reconnaissance financière de l’expertise professionnelle et le respect des règles déontologiques qui encadrent la profession. Le paiement des honoraires facturés, c’est aussi le gage de la survie du cabinet d’avocats. Raison pour laquelle vous trouverez également sur ce blog un guide anti-impayés. Mieux vaut donc bien connaître les procédures à mettre en œuvre en cas de contestation ou de défaut de paiement d’honoraires.
Ce processus implique notamment une décision du bâtonnier, suivie de l’apposition nécessaire de la formule exécutoire par le président du tribunal judiciaire, permettant ainsi l’éventuelle exécution forcée. Cet article explore les étapes, les délais et l’importance cruciale du respect des délais de prescription pour assurer le paiement des honoraires d’avocats.

Le rôle du Bâtonnier dans la contestation des honoraires

Dans le cadre de la profession d’avocat, le bâtonnier occupe une place centrale, notamment dans la régulation des honoraires. Lorsque des différends surgissent entre un avocat et son client concernant le montant des honoraires, leur règlement, le bâtonnier est saisi pour statuer sur la légitimité et la justesse de la réclamation en question. Concrètement, l’avocat saisit son Bâtonnier – le service de la Taxation – par une requête accompagnée des pièces justificatives.
L’affaire est instruite dans le respect du contradictoire et, après avoir entendu les parties, le Bâtonnier ou son représentant rend une décision. Cette décision, bien qu’elle confère une autorité de la chose jugée, ne possède pas la force exécutoire que détiennent les jugements standards. Le bâtonnier a le pouvoir de trancher les différends, mais pas d’imposer une exécution forcée ; cette prérogative revient au président du tribunal judiciaire.
Comprendre cette distinction est essentiel. La décision du bâtonnier détermine le montant dû, mais elle reste inerte jusqu’à ce qu’elle soit rendue exécutoire par une ordonnance d’exequatur. Le rôle du tribunal est de vérifier et d’autoriser l’exécution forcée, en vérifiant la régularité et la recevabilité de la demande d’apposition de la formule exécutoire. Ce pouvoir judiciaire, conféré au tribunal, ajoute une couche de garantie et de légitimité au processus de recouvrement des honoraires, préservant ainsi les droits des deux parties impliquées.

L’apposition de la formule exécutoire

La procédure d’apposition de la formule exécutoire constitue une étape cruciale dans le processus de recouvrement des honoraires. Elle transforme une simple décision ordinale en titre exécutoire, permettant à l’avocat de faire procéder à des mesures d’exécution forcée par un commissaire de justice si nécessaire. Ce processus commence par une requête auprès du président du tribunal judiciaire, qui seul détient l’autorité d’apposer cette formule. Cette démarche nécessite une attention particulière aux détails, car elle implique un examen minutieux de la validité et de la légalité de la créance.
L’importance de cette étape réside dans le contrôle supplémentaire qu’elle représente. Le tribunal doit s’assurer que la décision du bâtonnier respecte les normes légales et n’est entachée d’aucune irrégularité manifeste. En cas de défauts apparents, la requête peut être rejetée, ce qui souligne l’importance d’une préparation rigoureuse des documents soumis. Ainsi, cette procédure ne se réduit pas à un simple acte administratif, mais joue un rôle clé dans la protection des droits et des intérêts des parties concernées, en veillant à ce qu’aucun abus de procédure ne soit commis.

Délai de prescription pour la créance d’honoraires – 2 ou 5 ans

Le délai de prescription est un aspect fondamental du processus de recouvrement des honoraires de l’avocat, déterminant la période pendant laquelle une action peut être engagée pour recouvrer une créance. Ce délai varie en fonction de la nature de la créance et des circonstances spécifiques à chaque cas.
Avant l’apposition de la formule exécutoire, l’action en recouvrement des honoraires est soumise à la prescription applicable à l’obligation elle-même. Si les honoraires sont dus par une personne physique pour des services personnels, le délai biennal du Code de la consommation s’applique. Cela signifie que l’avocat dispose de deux ans pour engager des actions en justice pour recouvrer les sommes dues par son client. En revanche, pour les créances commerciales ou celles impliquant des personnes morales, le délai de prescription de droit commun, fixé à cinq ans par le Code civil, s’applique.

Impact de la prescription sur l’exécution forcée

Suite à l’apposition de la formule exécutoire, la prescription de l’exécution forcée entre en jeu. Conformément à l’article L. 111-4 du Code des procédures civiles d’exécution, la durée de prescription pour une exécution forcée est typiquement de dix ans pour les titres judiciaires. Ce délai commence à courir une fois le jugement exécutoire, c’est-à-dire après notification au débiteur et apposition de la formule exécutoire.
Cependant, pour les titres non expressément classés comme judiciaires, comme les décisions du bâtonnier, la prescription de l’exécution forcée se conforme au délai applicable à la créance d’honoraires initiale. Cela impose une vigilance accrue de la part de l’avocat pour ne pas laisser expirer le délai imparti, qu’il s’agisse des deux ans sous le Code de la consommation ou des cinq ans pour les cas commerciaux.

L’exécution provisoire

Les décisions du Bâtonnier en matière d’honoraires peuvent désormais bénéficient de l’exécution provisoire à concurrence de 1.500 € et hors honoraires de résultat…
Pour le surplus, en cas d’appel devant le Premier Président, l’avocat devra attendre l’arrêt d’appel pour espérer disposer enfin d’une décision exécutoire dans son intégralité. Mieux vaut donc ne pas laisser la dette d’un client s’accroître avant d’engager la procédure de recouvrement.

Le recouvrement des honoraires d’avocats est juridiquement complexe nécessitant une connaissance des droits et des obligations liés à chaque étape du processus. Depuis la décision du bâtonnier, qui définit le montant des honoraires dus, jusqu’à l’apposition de la formule exécutoire par le tribunal judiciaire, chaque étape nécessite une attention rigoureuse aux détails et aux délais.
En comprenant les distinctions entre pouvoir ordinaire et pouvoir judiciaire, et en respectant scrupuleusement les délais de prescription, les avocats peuvent protéger efficacement leurs intérêts financiers tout en respectant les droits de leurs clients.
En fin de compte, la maîtrise de ces procédés garantit non seulement le recouvrement des montants dus, mais aussi la préservation de la confiance et de l’intégrité au sein de la profession juridique.